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PHOTO GENIES : NICEPHORE NIEPCE, le premier et le dernier

Publié le par Miss Comédie

PHOTO GENIES : NICEPHORE NIEPCE, le premier et le dernier

 

Parce qu’il faut bien en finir avec les PHOTO GENIES, je vais enfin rendre hommage à celui par qui tout a commencé.

 

Cela paraît aller de soi, aujourd’hui, d’appuyer sur un bouton et de recevoir aussitôt une image qui restera ensuite un témoignage éternel, parfaitement restitué, de cet instant tombé dans l’oubli.

 

Comment l’idée folle de reproduire une perception visuelle fugitive sur un support définitif a-t-elle pu germer dans le cerveau de cet ingénieur pragmatique peu enclin aux digressions chimériques ?

Car il est parti de rien, cet homme, une vision banale depuis sa fenêtre, une plaque de métal, à tout hasard, et une chambre noire aléatoire… Quel calcul pouvait-il mener à cette alchimie…?

Aucun calcul, dit-on, mais le hasard, toujours le hasard. 

Le hasard est la providence des chercheurs qui multiplient leurs chances par leur assiduité et surtout leur patience. Ce sont les bienfaiteurs de l’humanité. Qu’ils reposent en paix.

 

Joseph NIEPCE est né en 1765 à Châlons-sur-Saône sous le règne de Louis XV.  Il avait 24 ans lorsque surgit la Révolution mais il garda toute sa tête et put voir défiler les campagnes de Napoléon puis sa chute, belles pages d’histoire, et commence à entrer dans la légende à la suite de l’empereur déchu en 1816.

 

Petit détail amusant, il lui prit l’envie de changer de prénom en 1800, à l’âge de 35 ans… Il choisit le prénom de NICEPHORE en mémoire de Saint Nicéphore, patriarche de Constantinople, qui prit position contre les iconoclastes au moment du concile de Nicée…

Signe probable d’un esprit rebelle, il garda ce surnom jusqu’à sa mort.

 

Toute sa vie fut consacrée à la recherche d’objets non encore identifiés et son parcours n’est qu’un champ d’explorations où l’on s’égare parmi des découvertes qui ne mènent à rien…  sauf à cette première photo, celle qui nous intéresse.

 

Comme l’histoire est très complexe, avec des détails techniques à la Dr Jekyll, je vais tout simplement reproduire l’historique relatif à cette première image.

 

C’est clair, il suffit d’imaginer l’insondable comme l’on imagine un Thomas Pesquet plongeant dans l’espace infini…

« À partir de 1816, Nicéphore Niepce entreprend dans sa maison de Saint-Loup-de-Varennes de multiples recherches sur la photosensibilité des matériaux pour tenter de fixer sur un support l'image du fond d'une chambre noire.

Il parvient finalement à un résultat à l'été 1827 au moyen d'une plaque d'étain recouverte de bitume de Judée (goudron naturel connu depuis l'Antiquité) rincée dans un bain d'essence de lavande. Il réalise depuis la fenêtre du premier étage de l'atelier de son domicile baptisé « Le Gras », la première héliographie / photographie de l'histoire de la photographie baptisée « point de vue du Gras » avec un niveau de netteté surprenant. En 1828, Niepce améliore sa technique et obtient des images d’une qualité supérieure avec des demi-teintes sur un support à base d'argent poli et en faisant agir des vapeurs d'iode sur l'image au bitume. La précision des images est étonnante. « 

Vous suivez ?

Bon, en fait il fallait avoir un bon niveau en physique-chimie.  Aujourd’hui, l’extrait de lavande a d’autres vertus...

Cela  se passait sous Charles X le dernier roi de France car son successeur Louis-Philippe n’eut droit qu’au titre de roi des Français.  Mais Nicephore n’en avait cure.

Il faut s’imaginer cet homme, la cinquantaine, fiévreux, scrutant l’image naissante sur la plaque de métal, à partir d’une chambre noire. 

Qu’appelait-on chambre noire ?  Cette camera obscura qui portera plus tard le nom de NIKON ou de Leica ? Ce fut aussi la cage mystérieuse qui renfermait un petit oiseau que le photographe, caché sous son voile noir, libérait avec un déclic magique.  Premières étapes tâtonnantes d’un phénomène qui allait devenir planétaire!

Il faut imaginer les étapes successives, innombrables, qui ont amené ce premier déclic.

Etait-il conscient, Nicéphore, de l’approximation de sa découverte ? Ou bien savourait-il cette première image  comme un aboutissement ?

Etait-il porté par la volonté irrépressible de transmettre ce qu’il voyait de sa fenêtre ?  Ce n’était pas, pourtant, un spectacle féerique…

Non, pour moi, ce que Nicéphore NIEPCE recherchait avant tout, à la différence des générations qui ont suivi, ce n’était pas la capture d’une vision magique, le souvenir d’un instant pris sur le vif qui allait demeurer intact pour l’éternité… C’était l’ivresse de celui qui a inventé ce qui n’existait pas.

Car NIEPCE n’était pas un poète. C’était un ingénieur et sa passion était plutôt la découverte et l’agencement d’outils destinés à une fonction précise.

Avec son frère Claude, qui avait la même passion et qui oeuvrait en Angleterre pour négocier leurs multiples brevets, il continua à améliorer la technique de sa première photo jusqu’à obtenir un tirage sur papier   -   il  écrit alors à son frère « nous sommes sur la bonne voie ».

Et puis, un jour de juillet 1833, l’inventeur meurt soudainement dans sa maison du Gras  -  arrêt sur image qui faillit couper court a ce beau début si le GENIE de la PHOTO ne s’était mis en tête de le transformer en phénomène planétaire.  …

 

Miss Comédie

 

 

 

 

  

 

 

 

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PHOTO GENIES / IRVING PENN

Publié le par Miss Comédie

PHOTO  GENIES / IRVING PENN

 

Encore, oui encore, des génies de la photo on n’en fait pas le tour, et il suffit d’évoquer un nom pour qu’un flot d’images surgisse qui n’appartiennent qu’à lui, reconnaissables entre mille.

Pour IRVING PENN, le flot n’est pas précisément tumultueux… c’est un homme réservé, réfractaire à toute folie créative… Pourtant, il jouit d’une renommée égale à celle des plus grands photographes novateurs de notre époque.

 

IRVING PENN, pour moi, avant l’inventaire de ses multiples talents, c’est d’abord son inimitable art du portrait. Comme celui de Picasso dont le regard perçant est presque insoutenable.

Et puis tous les autres portraits, aussi impressionnants, de personnages illustrissimes, dont le regard est le point culminant dans un décor réduit à sa plus simple expression.

Les portraits de PENN ne ressemblent à aucun autres.

Pour atteindre au plus profond de l’âme de son modèle, pour abattre la cuirasse de son ego, il connaît les manœuvres d’approche qui créent la complicité et la confiance. Puisant dans l’art du portrait de peintres comme Le CARAVAGE ou GOYA, il réussit à donner à ses photos un relief pictural.

 

Pour moi, malgré sa notoriété imposée par le magazine VOGUE, le vrai rayonnement d’IRVING PENN provient de sa série de portraits.

 

On pourrait  s’arrêter là  et ce serait déjà une belle carrière. Mais le coup d’envoi déterminant de sa notoriété fut cette couverture du VOGUE International d’octobre 1943 réalisée à New-York sur la demande de son directeur artistique qui était un ami.

Cette couverture fut son coup de génie : elle représentait une nature morte, ce qui ne s’était jamais fait.  Mais il avait lancé un style (et il réalisa lui-même par la suite 160 couvertures pour VOGUE, et pas seulement des natures mortes…).

Il n’en faut pas plus pour amorcer un bouche-à-oreille dans la presse ou ailleurs, et le nom d’Irving PENN a fait son chemin.

Lui, il n’est pas pressé et ce n’est qu’en 1950 qu’il répond à l’appel des sirènes de la capitale de la Haute Couture, ce Paris étourdissant qui le réclame, et il traverse l’Atlantique pour affronter le cercle très fermé des grands photographes de mode.

 

Il y avait là, quand même, un Richard AVEDON qui régnait en maître avec quelques autres caïds du genre.

L’univers de la mode, c’est spécial, il faut assumer.

La cohue des défilés, les rivalités des mannequins, le stress des créateurs en mal de reconnaissance,

IRVING PENN n’a pas aimé cette promiscuité.  Les dîners mondains, les collections, le fatiguent.

Il  s’installe dans un petit local rue de Vaugirard, lumière du jour, rideau de théâtre en fond permanent, et il  photographie les top-models à sa manière, c’est-à-dire comme des portraits, pour lui l’essentiel était l’humain avant le vêtement, avant le décor. Il est alors dans un état de grâce, et il réalise une série de photos superbes qui seront publiées dans le VOGUE de septembre-octobre 1950 avec son modèle préférée, Lisa Fonsagrives, une ancienne danseuse qu’il a ramenée avec lui de New-York et qui deviendra sa femme.

 

IRVING PENN est maintenant reconnu comme l’un des plus grands de la photo de mode, avec un style et une manière de procéder qui lui est propre et qu’il n’abandonnera jamais : la prise de vue en studio.

Jamais d’incursion dans la rue ou la nature, jamais de décor construit autour du modèle, tout doit se passer dans l’intimité et la concision d’un fond en arrière-plan et du modèle, seul sujet de contemplation.

Il ira même jusqu’à se faire construire un studio mobile à la manière d’un mobile-home pour l’accompagner dans ses voyages.

 

Parce que PENN est un grand voyageur.  Un an à peine après ses aventures dans les milieux du chiffon, il entame un épisode nouveau qui n’a rien à voir : LES PETITS METIERS.

Voilà qu’il s’est pris d’intérêt pour les métiers manuels, leurs outils, leur quotidien, leurs acteurs, et il sillonne les quartiers populaires des grandes villes pour mettre en lumière cette corporation qui travaille dans l’ombre.

Il ne fait pas les choses à moitié : un triptyque sera réalisé sur les petits métiers de Paris, Londres et Moscou…

 

J’oubliais : il est revenu à New-York, s’est installé dans un nouveau studio toujours aussi sommaire, et entre deux voyages il fait des photos de nus, spécialement des danseurs, il travaille sur de nouvelles techniques de tirage, il continue à faire des photos de mode dans le même esprit spartiate que VOGUE continue à publier jusqu’à la fin de sa vie.

 

Tout cela pêle-mêle, impossible de mettre une logique là-dedans, moi je vous le dis, sa botte secrète c’est le Portrait.

 

Et au fait : Qu’est devenue Lisa FONSAGRIVES ? 

 

Miss  Comédie

 

 

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