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A PROPOS DE CALIGULA

Publié le par Miss Comédie

A PROPOS DE CALIGULA

 

Albert Camus  aurait eu 103 ans  le 7 novembre dernier.

Entre autres belles paroles, il avait dit : « Je ne connais qu’un devoir, celui d’aimer ».

Parole chrétienne mais plus que cela.  Parole de sage, toutes religions confondues.

 

A PROPOS DE CALIGULA

CONVERSATION IMAGINAIRE

Sur la scène du théâtre Hébertot à Paris. 

 La première lecture de  CALIGULA vient de s’achever.  Traumatisés, les comédiens se sont retirés un à un après avoir brièvement salué Albert Camus et Paul Oettly   le metteur en scène, qui s’éclipse à son tour.

Gérard Philipe, lui, est resté assis, le front baissé.  Camus s’approche de lui.

« Gérard, qu’est-ce qui ne va pas ?

Gérard Philipe relève la tête, visiblement très remonté.

« Albert, je veux comprendre.  Pourquoi m’avoir choisi moi, avec ma figure d’ange, pour incarner Caligula, ce monstre démoniaque ?

Croyez-vous que je sois crédible  dans ce rôle ?

Albert Camus s’assied face à son acteur, prêt au combat.

« Tu le seras car ce monstre est en toi, comme en chacun de nous.

Caligula n’est pas mort, il sommeille en tout homme  investi du pouvoir.

Si je t’ai choisi c’est justement pour montrer que l’être le plus doux, le plus angélique qui soit, dès qu’on lui donne le  pouvoir, devient  un tyran  totalitaire, oubliant toute mesure.

«  Vous allez être déçu, je ne me sens aucun signe, même dissimulé au plus profond de moi, de ces penchants odieux.

« Tu n’auras qu’à dire le texte et ton personnage entrera en toi, les mots  réveilleront le monstre qui est en toi, tu deviendras Caligula.

« Mais je hais ce personnage !

« Tant mieux,  si tu l’aimais tu ne pourrais pas l’incarner.

« Je crains que Caligula  ne soit une figure dépassée, un symbole du pouvoir devenu risible.

«  Tu te trompes,  Caligula est omniprésent dans notre monde, toutes les époques ont eu leur Caligula et nous devons être prêts à le voir ressurgir là où nous l’attendons le moins.

Notre époque se meurt de croire que les choses peuvent cesser d’être absurdes.

Gérard Philipe se tait, écrasé par cette vérité. 

Puis, comme un reproche :

« Je n’ai que 23 ans, je ne connais pas la haine, je ne puis l’envisager, ni la simuler.  Croyez-moi, je serai un très mauvais Caligula.

Albert Camus sourit :

« Tu as l’âge du rôle !  Caius Caesar avait 27 ans lorsqu’il succéda à Tibère.   Il n’a pas été odieux tout de suite, il fut un empereur très populaire au début de son règne.

« Et alors ? Qu’est-ce qui lui a pris ?

« Le  pouvoir, le pouvoir…

« Est-ce qu’il était obligé de coucher avec sa sœur ?

« Ah, ça, c’était une pratique courante dans l’Antiquité !

Il y a un silence.  Puis Camus se lève, un peu las de cette discussion sans issue.

« Bon, Gérard, tu doutes, c’est normal, c’est même de bon augure, mais avant de rompre…

Gérard Philipe l’interrompt, se levant à son tour :

« Je ne reviendrai pas sur ma parole .  Mais après « Une grande fille toute simple », avouez que je change de registre…un peu brutalement !

« Ce rôle  va te rendre célèbre, je le sais.

Face à face, Camus pose  sa main sur l’épaule de Gérard Philipe, comme Scipion pose la sienne sur l’épaule de Caligula dans une scène émouvante de la pièce.  Et comme dans la pièce, Gérard Philipe recouvre de la sienne la main de Camus.

Une rafale de vent venue des coulisses parcours alors le plateau, faisant voler les feuilles des manuscrits sur la table, faisant vaciller les deux hommes.  Camus alors s’écrie :

« C’est l’esprit du théâtre qui s’insuffle en toi.  Le jour de la première il viendra t’aider à  te démultiplier.  Tu seras Caligula pour le temps que durera la pièce. »

 

Miss Comédie

 

 

 

 

 

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ABRACADABRUNCH à LYON

Publié le par Miss Comédie

ABRACADABRUNCH à LYON

L(INSTANT THÉATRE

ABRAADABRUNCH  de Iliel Vardar

Vous avez certainement vu, revu, entendu parler du « cultissime » CLAN DES DIVORCÉS  qui cartonne encore  à Paris et en province.

Voici sa 4ème pièce, tout aussi  déconnante, mais épicée d’un zeste de magie. Dommage que le titre soit si peu envoûtant.

Nous avons là un célibataire endurci, monstre d’égoïsme, au langage percutant comme un tir aux pigeons, les pigeons c’est nous, les fans de Michel Bernini qui fait mouche à chaque réplique.  Que dis-je à chaque mot, à chaque haussement de sourcils.

 

Vont  se succéder pour gâcher son petit déjeûner deux filles qui font le poids, (il faut du  culot pour se mesurer à un tel  partenaire.)

  Côté  comique elles ont de quoi l’inquiéter, côté mensurations elles ont de quoi l’émouvoir.  

Il y a d’abord  l’envoyée du « Grand », le dieu de la Centrale EDF, qui dégage un courant bleu électrique dès qu’on la touche.  Elle est là pour lui pourrir la vie et lui trouver une femme.   C’est ELLE, oui c’est comme ça qu’elle s’appelle et ça lui va bien, forcément.

 

Il ne  veut pas de femme  mais cette extra-terrestre  ne lui est pas indifférente,   du style bombe glacée,  mais capable d’émettre de petits cris et soupirs orgasmiques  très convaincants.

  .Il est prêt à craquer et à partager sa biscotte beurrée.

Pas de chance, elle s’évapore, disparaît sans crier gare.

Camille Durand incarne avec élégance et brio cette beauté pleine de mystère.

 

 

Arrive alors un personnage inénarrable, une sorte de marionnette  désarticulée, échevelée , vêtue en Galliano première époque, venue prendre possession de ce cœur à prendre. 

Eglantine, c’est son nom, ne recule devant aucune chorégraphie improvisée pour séduire le récalcitrant.

C’est Carole Benamhou bien connue des familiers de LULU SUR LA COLLINE, excellente dans tous ses rôles à transformation, virtuose de la sensualité comme de l’humour noir.   Là, elle est étonnante, débridée, follement drôle.

 

ABRACADABRUNCH (oh ce titre !) est une pièce impitoyable, d’un bout à l’autre les gens sortent  les mouchoirs car les larmes coulent tant le rire est compulsif.

 

 

Les rôles  sont joués en alternance par :

- pour ELLE :

Camille Durand, Virginie Mouchtouris.

- pour Eglantine : Carole Benhamou, Laurence Bonnet-Blanchet.

-   pour  François : Michel Bernini, Ilyes Harouni.

La pièce se joue jusqu’à fin décembre, avec deux soirées exceptionnelles les 24 et 31 décembre.

Au théâtre LULU SUR LA COLLINE

60, rue Victor-Lagrange   69007 Lyon 

Tél :  04 72  98 36 28    et  wwwtheatre-de-lulu.fr

 

Miss Comédie

 

        

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ERRATA ---

Publié le par Miss Comédie

ERRATA ---

 

 

Ceci est la photo correspondant à l’article «PETITS CRIMES CONJUGAUX, d’Eric-Emmanuel Schmitt,  mise en scène par Jean-Luc Moreau  avec Fanny Cottençon et Sam Karmann.

Avec toutes mes excuses,

 

Miss Comédie

 

 

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PETITS CRIMES CONJUGAUX d'Eric-Emmanuel Schmitt

Publié le par Miss Comédie

PETITS CRIMES CONJUGAUX d'Eric-Emmanuel Schmitt

L'INSTANT  THÉATRE

PETITS CRIMES CONJUGAUX, D'Eric-Emmanuel Schmit

 

Le titre est trompeur. On s’attend à  voir encore une de ces comédies légères sur les  petites tromperies  du couple.

Erreur.

Cette pièce est un électrochoc  qui  secoue joliment.

Oh, pas tout de suite.

Ca démarre comme un polar d’Hitchock,  on se doute qu’il y a un mystère mais les dialogues sont encore alertes, presque drôles, il y a des rires dans la salle.

Un mari amnésique qui revient chez lui et qui cherche à savoir quel genre d’homme  il était avant l’accident, quoi de plus savoureux ?

 Il questionne, elle répond.   Il s’agit de retrouvailles émues,  juste un peu tendues. 

Nous sommes encore dans l’expectative, sans méfiance.  La suite va nous aiguiser l’attention.

L’écriture d’Eric Emmanuel Schmitt, somptueuse, foisonnante, impitoyable,  prend peu à peu des accents  à la Tennessee Williams pour dévoiler les ressentiments cachés de ce couple usé qui ne sait plus faire la différence entre l’amour et la haine.

Les aveux qui s’échappent, d’une violence libératrice, deviennent des mobiles de crime.

Nous ne rions plus, le silence se fait ,  nous sommes sous tension.

Construite comme une énigme policière, la pièce garde son mystère jusqu’à la fin.  Lequel des deux a voulu tuer l’autre ?

 

Sam Karmann et Fanny Cottençon nous obligent à nous identifier à leurs  personnages, tant ils y croient eux-mêmes. Le problème de leur  couple devient un problème universel.

   On se dit qu’on y réfléchira plus tard.  Pour l’instant, on veut savoir la fin.

Jean-Luc Moreau  a guidé ses acteurs vers une intériorité qui déclenche l’émotion.   Mise en scène pleine d’humanité,   si délicate qu’on  ne la sent pas,  on ne se doute pas qu’un sujet pareil doit être tenu serré,  sans l’ombre d’effets faciles.

Petits crimes conjugaux  n’est pas une pièce anodine. Elle nous laisse un goût amer, comme certaines pièces dont  la  profondeur  surprend, émervreille, dérange et nous poursuit longtemps.

Miss Comédie

 

Au théâtre Rive Gauche à Paris jusqu’au 16 décembre, prolongation possible

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