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LA DICTÉE DE BUNUEL, MON 3ÈME ROMAN

Publié le par Miss Comédie

 

 

 NOUVELLE VAGUE DE RENCONTRES...

 

 

Voilà, mon troisième roman est en ligne.

Il s’appelle  La Dictée de Bunuel.  Ca se passe dans les milieux artistiques des années soixante,  années qui fourmillaient de mythes, si je puis dire…

 

Je ne résiste pas au plaisir de vous en donner  un extrait, pour vous donner une idée.

Ceux d’entre vous  à qui cela donnera une envie frénétiqued’en lire plus

pourront commander le livre sur le site de MANUSCRIT.COM.

Quant à  ceux qui font partie de mes proches,  ils pourront aussi l’acheter et le faire dédicacer au cours d’une séance de signature à laquelle ils seront bientôt conviés.

 

« Au théâtre j’ai atteint un soir le comble du bonheur et du déchirement avec “Dommage qu’elle soit une P.” de John Ford, mis en scène par Visconti. Je dis aujourd’hui que cette pièce, cette mise en scène, ces comédiens, ce spectacle enfin, n’a jamais été surpassé et qu’il y a de fortes chances pour qu’un tel prodige ne se reproduise jamais. Voilà ce que je dis.  Ce lundi 27 mars 1958, il s’est passé quelque chose d’unique.  Alain Delon et Romy Schneider, ensemble, pris dans la tourmente de l’amour et de la mort, deux anges de Botticelli dans des décors et dans des costumes d’un luxe inouï.

  dommage003Les yeux voyaient une toile de Canaletto , animée par magie.

Les oreilles entendaient une musique céleste, la plus rigoureuse, la plus construite. Madrigaux de Fresccobaldi, motets de Palestrina pour donner le contrepoint au désordre des passions.

Le coeur battait car  l’amour et la guerre se donnaient en spectacle.

Et il y avait quelque chose de déchirant  dans la perception de cette oeuvre d’art : c’était son inutilité dans le temps car tout ici était de chair et d’os, et  voué à disparaître,  et chaque minute qui passait tombait pour toujours dans l’oubli. Comme chaque scène de la tragédie de la vie, que nous jouons pour quelques spectateurs jusqu’à notre dernier soupir.

Chaque larme, chaque regard, chaque envolée de robe, chaque coup d’épée, chaque inflexion de voix.  Disparus. Il ne reste rien.

Comme il ne reste rien d’Annabella et de Giovanni, frère et soeur incestueux.

 

Au premier rang j’absorbais leur totale beauté sans respirer.  Tout m’était souffrance. La vague impétueuse des rideaux cramoisis qu’ils empoignaient, les jupes de velours qui soulevaient la poussière, le claquement des talons,  les lames brandies, et puis le sang et la mort, et les outrances de ce texte d’un autre âge déclamé comme on crie sa douleur.

 Je pleurais.  C’était  trop de beauté pour cette vie.

Mais ll restait à voir ce qui n’arrive jamais. Le rideau tomba une première fois et lorsqu’il remonta pour les saluts, Romy s’évanouit.  Le visage aussi pâle que les perles qui luisaient sur sa gorge, elle ferma les yeux et se laissa glisser dans les plis de sa robe.  Delon la prit dans ses bras, la releva et l’on crut que la pièce continuait.  Mais le rideau balaya cet espoir et l’on ne sut plus rien.

L’orage qui s’abattit alors sur la salle debout, hurlante, jetant son merci en une clameur folle, me saisit.  Jamais l’on ne reverra ça. Au théâtre, jamais.  A Woodstock, oui, à Bercy, les pop-stars, les idoles chanteurs de rock... C’est une autre forme de cérémonie.  D’autres dieux vivants. "

 

(La Dictée de Bunuel – chapitre iii)

 

 

 

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BARTABAS; LA CHEVAUCHÉE MACABRE

Publié le par Miss Comédie

 

 

 

 

 

 

images.jpgBARTABAS !   Des années, que je voyais passer ses spectacles sans  pouvoir y assister – trop tard, trop loin, complet…  Les critiques déliraient, les foules se pressaient,  chaque spectacle montait en intensité, en créativité.

 Et ces titres  qui en  disaient long   :   Cabaret Equestre, Opéra Equestre, Chimère, Eclipse, Triptyk…..

Et cette année,  Calacas arrive à Lyon.

 

Ma déception est à la mesure de mes espérances. 

Le chapiteau  immense et noir promet déjà une messe noire, un rituel  équestre  que vont partager les spectateurs encore ignorants, encore  paisibles, encore au grand jour.

Distillés tout autour de l’enceinte circulaire, par dix escaliers périlleux  ils plongent dans l’inconnu,   ils descendent dans une obscurité totale vers leurs places indistinctes, tâtonnant, aveugles, distinguant à peine la piste  - l’autel –nimbée de rouge et déjà la magie opère, une magie noire qui désoriente et fait craindre le pire.

C’est le noir avant la lumière ?  le mystère avant la révélation ? on veut nous préparer au rite par le recueillement…. ?

Bernique !   Nous ne verrons jamais la lumière.

Nous sommes descendus aux Enfers à la rencontre de la Mort.

J’attendais des chevaux exercés au théâtre, bêtes domptées et rebelles à la fois, tout ce que Bartabas  avait cherché à  démontrer dans ses spectacles précédents : son amour irraisonné pour le cheval et ce que cet amour pouvait engendrer de prouesses et de poésie animales.

J’ai vu quelques chevaux manifiques à la crinière somptueuse, lancés dans un galop contenu comme au manège,  un galop d’une légèreté  telle qu’on les croyait courir au-dessus du sol.  Galop de cirque.

Qu’ont-ils fait  d’autre que galoper, ces superbes étalons d’or ou de feu ?

Rien.

Les squelettes ont envahi le chapiteau, suspendus à des fils ou courant à la poursuite de leurs montures, escaladant les croupes, se dressant debout dans des postures  guerrières, s’envolant dans leurs costumes allégoriques  et leurs voiles aériens pour une danse macabre d’une beauté   incontestable, mais…  Quand verrons-nous Bartabas murmurer à l’oreille de ses chevaux ?

Quand verrons-nous les chevaux artistes, les chevaux musiciens, les chevaux danseurs ?

Dans cette pénombre peuplée de fantômes, la musique  frappait fort. Tambours assourdissants, grosse caisse, cris et chants  rituels inspirés  de la fête des Morts au Mexique,  hurlements hispaniques rythmés par des instruments inconnus.

Quelques pauses dans ce vacarme, pour accompagner des numéros plus calmes, comme le seul qui  mit en scène un cheval en équilibre sur un cube, les quatre pattes réunies, le corps oscillant, obéissant aux mots secrets chuchotés par l’écuyer. Là, les flûtes  jouaient  mezzo voce, respectant le tour de force animal.

 

 

 

La nuit a régné tout au long du spectacle.    Il fallait s’y faire. Mais les rares jeux de lumière étaient fabuleux.    Il y avait tout autour et tout en haut des gradins  une coursive circulaire  qui offrait le plus éblouissant des spectacles. On voyait y galoper à tour de rôle un cheval blanc archangélique, un autre luciférien tout de noir luisant, et une ronde infernale de charrettes  aux ornements étincelants tirés par des chevaux que l’on aurait dit ailés, tout cela baignant dans une lumière qui  passait du bleu au rose, à l’or et à l’argent.

Un ravissement. 

 

Mise en scène époustouflante, costumes, masques, harnachements superbement réalisés, musique atrocement dérangeante, voilà pour moi les ingrédients de CALACAS sur un thème provocateur et totalement intellectuel.

 Il n’y a pas de place pour les chevaux dans CALACAS.    Bartabas leur a enlevé leur bannière d'acteurs pour les réduire à l'état de montures. Quel dommage.

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