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VOLTAIRE ET ROUSSEAU SUR SCÈNE A PARIS

Publié le par Miss Comédie

L 'instant théâtre

VOLTAIRE ET ROUSSEAU SUR SCÈNE A PARIS

 

Nous avons là les deux figures emblématiques des deux courants de pensée qui divisent le monde occidental. Leurs adeptes se livrent à une guerre sans merci à travers les medias, chacun se proclamant détenteur de la vérité. A notre époque vulgarisatrice on les appelle tout simplement les intellos et les écolos.

Mais nous sommes ici au siècle des lumières et les deux protagonistes de cette pièce ont une manière plus distinguée de se lancer des vacheries. Lequel aura le mot de la fin ?

Voltaire, ami des arts et des lettres, des nobles et des nantis, familier de la Cour, brillant causeur et écrivain à succès.

Rousseau, le rêveur solitaire, nostalgique de l’âge de pierre, ami de la Nature protectrice, ennemi de la société qui crée les inégalités et du progrès qui asservit les hommes.

Ils s’écrivent des lettres incendiaires, se provoquent à coups de publications belliqueuses qui deviendront pour la postérité les bases philosophiques de leurs futures émules.

Jusqu’à ce pamphlet qui les occupe aujourd’hui, point culminant de leur querelle, et qui va nous captiver d’un bout à l’autre de la pièce.

Publié sous un nom inconnu ce texte accable Rousseau l’accusant des pires méfaits, forfaits, trahisons, le condamnant pour finir à être brûlé vif.

Qui peut bien être l’auteur de ce pamphlet assassin  ?

Dans le cercle fermé des intellectuels, un style épistolaire est immédiatement reconnaissable et l’auteur percé à jour.

Rousseau s’invite donc chez Voltaire pour lui faire cracher sa félonie – mais pas tout de suite ! Il feint le doute, accumule les questions insidieuses, les fausses pistes, clame son indignation contre l’auteur inconnu.

Voltaire, lui, jubile visiblement. Il finasse, joue le parfait candide.

Il est sur son terrain favori. Il assène ses coups comme pour justifier un affront anonyme.

Les deux acteurs sont d’égale pugnacité, l’un dans l’éloge d’une société fidèle à la tradition, l’autre dans son refus d’un monde compromis par le pouvoir et par l’argent.

Jean-Paul Farré plaide pour le raffinement et la frivolité avec brio et son éloquence laisse subsister le doute. Est-il vraiment l’auteur du pamphlet ?

Jean-Luc Moreau nous perturbe avec la vision rétrograde d’un Rousseau anarchiste. Mais comment ne pas applaudir sa diatribe contre les comédiens, qu’il projette avec une telle conviction, lui qui a dédié sa vie au théâtre ?

C’est fabuleux de les voir s’écharper avec des arguments qui nous font chanceler dans nos propres convictions.

Où est la vérité ?

L’homme nait-il vraiment bon ?

Le progrès ne fait-il que pervertir l’homme ?

Peut on mettre fin aux inégalités ?

Questions de bac-philo ! Chacun remettra sa copie avec sa vérité.

Pour nous spectateurs, l’affrontement devient jubilatoire car il y a aussi une belle dose d’humour sous-jacent dans ces joutes où les coups d’épée font mouche à chaque envoi.

On ne peut s’empêcher de penser, en sortant, que décidément l’histoire est un éternel recommencement.

 

Miss Comédie

Au théâtre de Poche-Montparnasse jusqu’au 1er juillet 2017

Une pièce de Jean-François Prévand mise en scène par Jean-Luc Moreau, avec Jean-Paul Farré et en alternance Jean-Luc Moreau et Jean-Jacques Moreau.

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

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