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DÉDIÉ A TIPPI HEDREN

Publié le par Miss Comédie

V

 

 

 

  TIIPPI-HEDREN.pngDEDIE A TIPPI  HEDREN, petit thriller qu’aurait pu tourner l’héroïne des « OISEAUX » de Hitchcock.

 

 Une chambre, fenêtre grande ouverte, au 19ème étage d’une tour à Boulogne-Billancourt.

C’est l’été, mais le soleil ne s’est pas encore levé.  Le jour qui pointe est presque hivernal.

Marie regarde les nuages lourds de pluie qui encombrent le ciel au-dessus d’une ville prostrée dans un refus de s’éveiller.

De cette fenêtre en plein ciel, elle domine Paris.  Parfois elle s’imagine que d’un geste, d’un regard même, elle pourrait commander les mouvements de la ville.

Marie est heureuse au sommet de sa tour.

 

 

  TOUR.jpgMarie descend de chez elle. La plaque « place Corneille » apposée sur le mur à droite du porche de l’entrée lui semble aujourd’hui incongrue. « Un oiseau de malheur »,pense-t-elle.  Et pourquoi, tout à coup, cette hésitation, ce pressentiment ?

Elle se souvient qu’elle a laissé grande ouverte la fenêtre de sa chambre.

Elle lève la tête et regarde au-dessus d’elle les rangées de baies vitrées de la tour Ouest, avec leurs stores rayés bleu et blanc. Elle pense que même là-haut, tout peut arriver. Un orage,  la foudre, un coup de vent violent. Elle peut très bien ce soir retrouver son appartement saccagé.

 

Marie regarde sa montre.  Avec le métro, elle peut encore être à l’heure à son rendez-vous.

Elle fait demi-tour et se met à courir vers l’ascenseur.

 

 

 

Marie ouvre la porte de sa chambre et se fige. Quelque chose d’énorme bouge sur la rambarde du balcon. Un oiseau monstrueux. Une mouette.

Elle est gigantesque, effrayante dans sa proximité. Ses pattes roses et griffues s’agrippent à la barre de fer. La masse de son corps fumant, plumes hérissées, obscurcit la pièce comme une menace venue du ciel.  Son bec est entrouvert, comme prêt à saisir une proie. Son œil rond est porteur de haine.

 

 

4EME-MOUETTE.jpgUne peur subite s’empare de Marie. Les mouettes arrivent-elles jusqu’à Paris ? Les mouettes volent-elles à la hauteur d’un dix-neuvième étage ?

Puis elle fait un geste du bras et l’oiseau s’envole pesamment. Prend de la hauteur et pousse son cri de désespoir, un cri qui l’épouvante.  Marie la voit tournoyer autour de la tour avant de disparaître, grise sur le gris du ciel.

Marie met la main sur son cœur qui bat follement. Pourquoi cette peur ? C’est ridicule.  Jusque-là, une mouette en vol était un symbole d’évasion, et son cri lui parlait de l’immensité de la mer.

Posée sur son balcon elle devenait menaçante, épaisse et prosaïque comme un pigeon géant. Un oiseau de malheur. MouetteRieuse_DSC5955.jpg

 

Marie pense à ce pressentiment qui l’a fait remonter en toute hâte.  Depuis combien de temps la mouette était-elle en observation sur son balcon ?  Ne s’était-elle pas engouffrée par l’ouverture pour aller se poser, qui sait, sur sa couverture sur sa table de chevet, sur son bureau ?

Quel esprit maléfique habitait  ce corps répugnant ?  L’idée que l’oiseau eût pu frôler ses vêtements, déposer ses immondices dans quelque endroit de la chambre  qu’elle ne découvrirait que plus tard, lui donne la nausée.

Elle reste là, ne sachant quoi faire, désemparée.

« Elle va revenir »  Cette certitude l’envahit de terreur. Elle sait qu’elle ne pourra plus jamais regarder le lever de soleil avec la même sérénité.

 

Maintenant elle sait qu’elle doit quitter cet appartement.

Elle se sent soudain au centre d’une sinistre machination, obligée de fuir sur un ordre d’évacuation venu d’ailleurs.

Elle aurait dû se méfier de la plaque. C’était ici la place des corneilles et autres oiseaux  maléfiques.

Marie se dirige vers la fenêtre avec répugnance et la ferme, au moment où le premier coup de tonnerre fait trembler les vitres.

Elle s’allonge sur son lit.

L’heure de son rendez-vous est passée. mouette-en-vol-1-copie-1.jpg


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