SOUVENIRS MILLESIMES
Fernandel en tournée (suite et fin)
GENEVE, fin d'une merveilleuse aventure.
La tournée se termine à Genève. Trois soirs où le spectacle s’est déroulé sur un nuage.
Ce soir c’est la dernière. Je suis là, en coulisses, attendant d’entrer en scène pour mon morceau de bravoure.
J’entendais les rires dans la salle, Fernandel est en grande forme. Il fallait me concentrer. Dans la scène suivante Eva de Berg allait révéler sa véritable nature et menacer tout le monde avec un revolver. Dans le genre casse-gueule, on fait pas mieux.
Une tirade grand-guignolesque où je devais passer aux aveux en sanglotant, devant les gens du cirque pétrifiés. Une scène terrible, un pari fou pour la comédienne. Basculer ainsi du rire aux larmes et rester crédible, pathétique même, c’est plus difficile que de jouer Macbeth.
Robert Thomas ne l’avait probablement pas fait exprès, mais cette scène était un excellent exercice pour me préserver de l’automatisme. Elle m’obligeait à chercher chaque soir au fond de moi la déroute, la panique et les larmes. En même temps, il fallait rester dans les limites de ce que réclame la comédie. Pas de grandiloquence, pas de démonstrations incontrôlées,
attention, tout ça finira bien, il ne faut pas assombrir la bonne humeur du public, non tout ce qu’on vous demande c’est d’être crédible dans un moment charnière où l’action rebondit - seulement crédible.
Au moment d’entrer en scène, une phrase d’Antonin Artaud me traverse l’esprit : “quand je vis, je ne me sens pas vivre. Mais quand je joue, c’est là que je me sens exister.”
Je fis les quelques pas qui me séparaient de l’ombre et de la lumière. Le trac me quitta à cette minute, comme chaque soir.
Dernière ovation, et le lendemain matin le car reprend la route de Paris. Ses occupants pensifs, repliés contre la vitre, revivent chaque instant de ce périple comme on revit un rêve impossible. Un an plus tard, Fernandel quittait la scène pour toujours. Son sourire généreux et son accent ensoleillé resteront longtemps dans les mémoires.
GENEVE, fin d'une merveilleuse aventure.
La tournée se termine à Genève. Trois soirs où le spectacle s’est déroulé sur un nuage.
Ce soir c’est la dernière. Je suis là, en coulisses, attendant d’entrer en scène pour mon morceau de bravoure.
J’entendais les rires dans la salle, Fernandel est en grande forme. Il fallait me concentrer. Dans la scène suivante Eva de Berg allait révéler sa véritable nature et menacer tout le monde avec un revolver. Dans le genre casse-gueule, on fait pas mieux.
Une tirade grand-guignolesque où je devais passer aux aveux en sanglotant, devant les gens du cirque pétrifiés. Une scène terrible, un pari fou pour la comédienne. Basculer ainsi du rire aux larmes et rester crédible, pathétique même, c’est plus difficile que de jouer Macbeth.
Robert Thomas ne l’avait probablement pas fait exprès, mais cette scène était un excellent exercice pour me préserver de l’automatisme. Elle m’obligeait à chercher chaque soir au fond de moi la déroute, la panique et les larmes. En même temps, il fallait rester dans les limites de ce que réclame la comédie. Pas de grandiloquence, pas de démonstrations incontrôlées,
attention, tout ça finira bien, il ne faut pas assombrir la bonne humeur du public, non tout ce qu’on vous demande c’est d’être crédible dans un moment charnière où l’action rebondit - seulement crédible.
Au moment d’entrer en scène, une phrase d’Antonin Artaud me traverse l’esprit : “quand je vis, je ne me sens pas vivre. Mais quand je joue, c’est là que je me sens exister.”
Je fis les quelques pas qui me séparaient de l’ombre et de la lumière. Le trac me quitta à cette minute, comme chaque soir.
Dernière ovation, et le lendemain matin le car reprend la route de Paris. Ses occupants pensifs, repliés contre la vitre, revivent chaque instant de ce périple comme on revit un rêve impossible. Un an plus tard, Fernandel quittait la scène pour toujours. Son sourire généreux et son accent ensoleillé resteront longtemps dans les mémoires.
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