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SERGE GAINSBOURG, l'AMORAL

Publié le par Miss Comédie

S

 

 

chemise blanche 

23 février 2011.  Le studio de Radio Classique où Gilles VERLANT, le biographe de Serge GAINSBOURG, est l’invité en direct de Olivier BELLAMY.

Assis dans l’ombre, Serge écoute ça sans piper.    On le sent très malheureux de ne pas pouvoir fumer.  Il porte un costume noir sur une chemine blanche ouverte et il est chaussé de ses éternelles  cycliste Repetto.  Il  a de belles mains fines de pianiste.

 

-  C’est vrai, tout ce qu’il raconte  sur vous, ce biographe ?

-  Affirmatif.  Son livre fait de moi un héros, mais c’est un peu tard.

- Il paraît que vous lui avez accordé plus d’une centaine d’heures d’interview.

  Vous prépariez votre postérité, en somme ?

-  Postérité je m’en tape  je le recevais sur sa demande, vu ?  Il m’a harcelé pendant des années.  C’est tout bénef pour lui, aujourd’hui  il est che-ri, VERLANT ( il rit tout seul du bon mot)

-  Et ce film, GAINSBOURG vie héroïque, vous l’avez vu ?Affiche.jpg

-  Of course. 

-  Et alors ? votre impression ?

-   Un :  le sous-titre est ridicule, à moins de le prendre au  51ème degré, comme le  Pastis.  Deux :  je ne savais pas que j’avais un jumeau aussi vilain que moi.  Avoir déniché ce mec-là,  Eric ELMOSNINO, c’est fortiche.   Trois : pour ce qui est des nanas…  les pauvres.   Passons.  La CASTA  s’en sort  pas mal mais à côté de BARDOT c’est une poupée gonflable.  Cela dit, je l’aurais connue à l’époque, j’aurais bien fait un duo de musique de chambre avec elle.

 

- Avec quel artiste aimeriez-vous qu’on vous compare ?

-  Avec Boris VIAN.  Si vous prononcez le nom de Léo FERRE, je me barre.

-  Qu’avez-vous de commun avec Boris VIAN ?

- On nous a craché dessus, faute de cracher sur nos tombes.

-  Poètes maudits ?

-  Maudits mais pas marginaux, attention !  Moi en tout cas, j’aimais le luxe et je ne me privais de rien.  

-  Vous avez souffert de votre célébrité ?

 

Il éclate de rire.

 

-  Ah ! Elle est bien bonne.  Je suis célèbre depuis le 2 mars 1991,  jour où j’ai cassé ma pipe. 

-  Enfin quand même !  Vos chansons pour GRÉCO, François HARDY, France GALL   Jane BIRKIN, Catherine DENEUVE…ont été des tubes !

-  Pour  les chanteuses, pas pour  les chansons.

-   Vous avez un tableau de chasse impressionnant. Pour un homme qui se dit laid !

-  J’ai ma botte secrète, vous savez. (sourire en coin)

- Votre favorite ?  BARDOT ou BIRKIN ?

 -  Domaine privé. No comment.Avec-BB.jpg

 

 

On entend à ce moment-là le 1er mouvement de la Symphonie du Nouveau Monde de Dvoràk.

Serge chantonne « INITIALS B.B »

-  Une œuvre magistrale !

-  Elle le valait bien…

-  Vous avez été un grand prédateur de musiques classiques, non  ?

-   J’aime la grande musique.  Moi je fais de la petite musique.

 De la musiquette.  Un art mineur.  Donc, j’emprunte.

-  Vous empruntez aussi aux poètes, comme Verlaine,  pour « JE SUIS VENU TE DIRE QUE JE M’EN VAIS… Etes-vous tellement à court d’inspiration ?

-  Pour dire la souffrance,  me sens très en-dessous.  J’ai besoin qu’on me souffle les mots.  Je suis  minable.

-  Quelqu’un a dit « le plus grand signe d’orgueil c’est de se mépriser soi-même ».  Pourquoi, à votre avis, le public vous a-t-il   porté aux nues ?

- Parce que… (il susurre) j’étais très porté sur  les nues !… Non, parce que  j’étais alcoolique, provocateur, érotomane.   Ma chanson « JE T’AIME, MOI NON PLUS » m’a fait faire un bond au hit parade.  Là, j’ai fait fort : faire un scandale avec un prélude de CHOPIN !   (il se marre).

-  Il ne s’agissait donc pas de talent ?

-   Pas de talent musical, en tout cas. 


-  Avez-vous gagné beaucoup d’argent ?

- Pas mal.  Mais le fisc prenait tout. Quand j’ai brûlé ce billet de 500 francs à la télé, en 1984, c’était pour dénoncer le racket fiscal.

 

Il écoute le morceau suivant : le 4ème mouvement de la sonate pour piano N°1 de Beethoven.  Il chantonne «  Je suis une poupée de cire, poupée de son… »

je le regarde.  Même assis de guingois sur sa chaise, il  impressionne par son élégance naturelle.   Une élégance que l’on retrouve dans tous ses textes, même les plus grivois. Son visage  creusé au regard mélancolique est  celui d’un homme revenu de tout.  Il est finalement très séduisant.

 

-  Vous avez dit une phrase  historique : « Le grand avantage de la laideur, c’est qu’elle dure. »  Et bien, je ne suis pas d’accord.

- Ah non ?

-  Non, quand je vous regarde, je vous trouve beaucoup plus beau qu’à vingt ans.

 

Il a un sourire tordu pour masquer sa joie.  Au fond, il n’est pas si désabusé que ça.  A l’antenne, Olivier BELLAMY et Gilles VERLANT  n’en finissent pas de chanter ses louanges.

 

Il pousse un soupir et se lève brusquement.

 

 Cigarette-  J’en peux plus, j’ai besoin d’une cigarette.  Et d’un 102.  Je vais voir où je peux trouver ça.

 


Il sort du studio sur la pointe des pieds.  J'ai attendu le temps d'une cigarette.

Mais il n'est pas revenu.

 

 

 

 

 

^l

Commenter cet article
P
<br /> Super bien ecrit, on entendrait presque sa voix. C'est trop con qu'il soit parti, c'etait vraiment un genie. Et dire qu'on a toujours pas sorti son film dans les salles de Portland!!<br /> <br /> <br />
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I
<br /> Barbara, je l'entends parler en lisant ton texte. En plus j'ai entendu cette émission en me demandant ce qu'il dirait en l'écoutant ! Bravo, tu sens et retranscris vraiment bien.<br /> <br /> <br />
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