ITINERAIRE DU MAGNIFIQUE
1988 : Vingt- six ans ont passé. Belmondo, à 55 ans, règne sur les écrans mais son itinéraire est en train de marquer le pas. Celui que lui propose Claude Lelouch va le remettre sur le chemin du succès.
Richard Anconina, le nouveau venu, n’est pas vraiment un gamin, il a déjà 35 ans mais en paraît dix de moins. Lelouch l’a remarqué dans le film de Claude Berri TCHAO PANTIN, où il a récolté le César du meilleur espoir masculin.
Voilà un face à face qui rappelle quelque chose !
Sur le plateau de ITINERAIRE D’UN ENFANT GATE, ils viennent de régaler l’équipe du film avec la scène d’apprentissage qui est devenue une scène culte.
L’apparente aisance de leur jeu leur a demandé un gros effort de concentration et la pause est la bienvenue.
Les deux compères se sont éloignés vers un endroit tranquille, hors du temps.
Anconina sort une cigarette et tend le paquet à Belmondo, qui refuse.
« Merci, je fume plus.
« Ah bon, pourquoi ?
« Je fais du yoga.
Anconina allume sa cigarette en riant :
« Ah, c’est bien, ça. Vous avez arrêté les cascades ?
Belmondo sursaute :
« Mais pas du tout ! Quel rapport !
Anconina, tranquillement :
« Ben, le yoga, c’est moins casse-gueule que les cascades, non ?
Belmondo affiche un large sourire :
« Ca, c’est sûr ! Mais il y a deux choses que tu dois savoir. Primo, je fais pas de yoga, c’était une blague, deuxio , j’adore le casse-gueule, et si tu veux savoir j’adore être en danger, le danger, ça me fait bander ! C’est une confidence que je te fais, pour que tu saches à quoi t’en tenir, mon p’tit.
Anconina est un peu choqué :
« Confidence trop intime… Gardez ça pour vous, ça pourrait vous rendre impuissant (il rit sous cape)
« Très drôle… Mais dis donc toi, mon joli, sais-tu au moins ce que c’est que le danger ?
Anconina ne rit plus. Son regard devient dur.
« Oui.
« Ah oui… Raconte.
Les yeux fermés, Anconina murmure comme pour lui-même :
« Je suis seul, face à la caméra, ils sont tous là, ils attendent… J’ai la trouille... Le moteur tourne, il faut que je sois juste… je suis à la recherche de la vérité. »
Très ému, Belmondo se souvient.
« Oui... oui je sais, mon p’tit, je sais... j’ai été dans cet état à ton âge, mais j’avais un maitre. Tu es mes vingt ans, me disait Gabin. Venant de lui, c’était un sacré compliment. A toi de jouer, avec le danger, maintenant ... »
Miss Comédie
Et si mon corps ne me permet plus de réaliser des cascades, de foncer à bord d'une Ferrari, de courir d'un tournage à un autre, d'une représentation à la suivante, il ne m'empêche pas de tout revivre, comme si c'était hier, comme si c'était aujourd'hui. Je mesure, en vous la racontant, combien j'ai aimé la balade, combien elle a été joyeuse, folle, riche, semée d'amitié et d'amour »
Voici ce qu’écrivait Jean-Paul Belmondo dans son livre Mille vies valent mieux qu’une paru en 2016.